Ce vin liquoreux doit sa spécificité à un climat favorable et à un champignon. Les brumes matinales du Layon favorisent la surmaturation et le développement du botrytis sur les grains. La botrytisation des grappes permet à ces champignons de se nourrir de l’eau des raisins, ce qui augmente leur teneur en sucre. On parle alors de « pourriture noble ».
L’appellation se trouve en aval de la commune de Thouarcé et s’étend sur les pentes raides de ses coteaux : « Les Melleresses », « Beauregard », « La Montagne », « Les Hauts Fleuris » et « Fesles ». Les coteaux y sont raides et les sous-sols de schistes gréseux. On l’appelle bonnezeaux, mais pour les gens d’ici, il s’agit du cru bonnezeaux !
L’histoire pas si moelleuse du bourg.
L’histoire de Thouarcé et du bourg de Bonnezeaux et de ses vins se confond avec l’histoire de France. La capitale des comtes d’Anjou n’est qu’à une trentaine de kilomètres du vignoble rattaché au royaume de France en 1258, la région connaît son apogée au XVe siècle sous le Bon Roi René.
Quelques années plus tôt, le village concentre à nouveau les feux de l’actualité en 1774, le roi Louis XVI canalise le Layon. Commencée en 1775, l’opération est placée sous la protection de son jeune frère, le comte d’Anjou et de Provence futur Louis XVIII. Elle a pour but de donner un débouché national aux mines de charbon de Saint Georges sur Layon par la Loire. Mais, elle va surtout permettre au fameux vin liquoreux de se faire connaître dans tout le pays et même au-delà.
À la fin du 18e, les guerres de Vendée font rage jusqu’à Thouarcé. Le Layon est utilisé comme ligne de démarcation entre républicains et royaliste et les mouvements des ailes des moulins sont autant de signaux secrets, de communications entre les belligérants. Avec 23 moulins, c’est une commune à vent ! Il y avait de quoi constituer tout un langage. Tout un alphabet de moulins. Songez que le latin a d’abord comporté seulement 20 lettres, puis 23, puis 26. Alors avec un peu d’imagination, ces moulins offraient des possibilités de combinaisons pas imaginables.
Seulement, les canaux seront saccagés à la révolution et jamais restaurés. Il n’en restera guère que les six derniers kilomètres sur la soixantaine de départ. Ils seront utilisés jusqu’au début du 20e siècle. De la vingtaine des écluses initiales, celle de Thouarcé est la mieux conservée et la plus facilement visible dans l’Avenue des Trois Ponts. D’ailleurs, l’eau est cruciale à Thouarcé ! Rien que le cru bonnezeaux en dit long ! Quelle ironie ! Le nom de l’un des meilleurs vins liquoreux du monde serait un hommage à l’eau !
Seulement, doit-on l’attribuer à des sources minérales ferrugineuses très en vogue sous le Second Empire et aujourd’hui disparues ? Les « bonnes eaux » ? Ou bien l’expliquer par une origine celte ? Origine qui remontrait au 11e siècle issue des noms Burniselus, Bonnezel, Bonnazel ou encore Bournazel. Autant dire que les spécialistes, du vin, de l’histoire ou des étymologies ne tranchent pas !
Tous s’accordent en revanche sur l’ancienneté du hameau et de Thouarcé et sur son étonnante résistance aux aléas historique. Incendié deux fois en 1793 et 1794, le village a été le théâtre des plus violents abus de la Révolution… Les plus vieux bâtiments ont 200 ans à peine ! Neuf, pour ainsi dire. Sauf le cas d’une exception notable, le clocher beffroi de l’église Saint-Pierre est un joyau architectural roman du 12e siècle. Bref, l’histoire passe, le vin demeure.