Comment marche un sol ?

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Le terroir c’est d’abord le sol. Quand on parle de terroir, on se figure souvent un patrimoine, une terre imprégnée d’un certain esprit paysan, d’un savoir-faire unique, d’une culture particulière. Bref, la première idée du terroir c’est son rattachement à la terre. Terre, terroir, ça ne consonne pas sans raison.

Voyons déjà comment fonctionnent les terroirs français pour ensuite s’attaquer aux singularités de notre région qui donne des caractéristiques si particulières à nos vins d’Anjou.

L’arbre et le ceps.

Le système vivant fonctionne un peu partout en France comme ça. L’arbre est le maître des sols, il fait tomber ses branches mortes et ses feuilles qui seront mangées par la faune épigée à la surface et dont les excréments formeront de la matière organique très fine.

 

Cependant, la faune épigée ne digère pas tout. Cette matière organique qui provient des arbres est composée, entre autres, de molécules de lignine. Or la lignine c’est incroyablement résistant, c’est ce qui a transformé la liane qu’était Vitis Vinefera en ceps, et c’est ce qui rend le bois dur. Cette lignine dans la nature ne disparaît pas par l’action du Saint-Esprit, mais grâce aux seuls organismes capables de l’attaquer, les basidiomycètes. Ceux-là vont transformer la matière organique et la lignine en humus. Tout cela se passe à la surface du sol.

 

L’arbre (ou le ceps) a un double enracinement, un enracinement horizontal et un vertical. Au printemps, les sols vont se réchauffer et les humus qui ont été formés par les basilomycèthes vont être minéralisés par les bactéries. Les champignons font l’humus et les bactéries minéralisent. Ces bactéries vont libérer du nitrate et du phosphate qui vont pénétrer dans le sol avec la pluie et les racines horizontales vont pouvoir les récupérer pour alimenter leur frondaison.

 

L’arbre a un deuxième enracinement que l’on appelle pivot ou système pivotant qui va s’enfoncer verticalement jusqu’à la roche mère, un chêne peut avoir jusqu’à 150 m de racines. Ces racines vont d’abord transporter l’excédent d’eau en surface dans la nappe phréatique. L’arbre est le seul organisme au monde qui remplit les nappes ! Et ces racines très profondes vont sécréter des acides pour attaquer la roche et les minéraux et fabriquer de l’argile.

 

Certaines racines vont mourir et comme à la surface, une faune va s’occuper de désencombrer les sols en les transformant en matière organique, c’est la faune endogée. Pour donner une petite idée de la contribution de cette faune, un blé c’est 200 km de racines et 5000 km de poils absorbants, y’en a 200 par m2, pour un champ moyen ça fait 4 milliards de km de racines et de poils. 

 

Donc, l’argile est produite en profondeur, l’humus en surface, la faune endogée s’occupe d’aérer le sol dans les profondeurs et la faune épigée nettoie la surface.

Comment l’argile et l’humus se rencontrent ?

Ils doivent bien se rencontrer pour former le sol que l’on appelle complexe argilo-humique.

 

C’est là qu’intervient une troisième faune, celle du lombric, du ver de terre ou encore le termite dans les pays tropicaux.

Ils habitent des galeries profondes et toutes les nuits ils sortent, prennent de l’humus puis redescendent. Ils forment des crottes, des turricules, et il se trouve que ces verres ont une glande qui s’appelle la glande de morelle très riche en calcium. Donc, ils remontent de l’argile en creusant, qu’ils mélangent avec l’humus dans leurs intestins.

Et, la nature étant bien faite, il se trouve que les argiles ont des ions négatifs, les humus sont négatifs et le calcium est un ion qui a deux charges positives. Une charge positive va attacher l’argile et l’autre l’humus formant le complexe argilo-humique.

 

Le premier à s’intéresser aux vers de terre c’est Darwin. En les observant, il va établir la première échelle de datation fiable. Y’a un fait bien connu de l’archéologie c’est que souvent, plus on creuse profond plus on remonte le temps. On trouve au plus profond les pierres taillées, puis les vestiges gaulois et romains, ensuite ceux de Moyen Âge jusqu’à la gourmette de votre grand-père. Ce n’est pas que nos ancêtres vivaient profondeur comme des taupes, non, c’est que tous les jours les vers de terre font la même opération. Ils remontent de la terre et enfouissent nos choses. Darwin ayant remarqué qu’ils remontaient au chouïa près leur poids en terre chaque jour, il ne restait plus qu’à faire quelques calculs pour estimer à combien d’années de travail de lombric correspondait un mètre de profondeur. Les problèmes ont suivi, et continuent, puisque le monde ne pouvait plus avoir 6000 ans comme l’affirmait la Bible.

 

Il y’a tout ce formidable travail d’équipe sous nos pieds, et c’est pourquoi y’a de quoi se préoccuper de la disparition des deux tiers d’insectes de nos sols. Car ce travail de fourmi maintient en bonne santé un terroir, il vaut mieux en prendre soin si l’on veut continuer à voir pousser nos raisins.

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